Encore une satanée lettre de mon père. Il croit quoi ? Que je vais le rejoindre ? Non mais il se prend pour qui. Il y a treize ans il n’a pas voulu de moi, il n’a qu’à assumer. Et je suis certaine qu’il essaie de me manipuler. Il fait de belles phrases, me dit des mots doux. Il veut simplement que je rejoigne son clan, mais il peut se mettre le doigt dans l’œil, ça n’arrivera jamais. Je ne suis pas dupe. Ce n’est pas parce que je suis jeune que je ne sais pas réfléchir. C’est un idiot, un salaud, il ne mérite même pas d’avoir un fils. Il me l’a dit qu’il avait un fils…je ne sais rien de lui. Je suis sûr qu’il est malheureux, il a grandi avec, il ne peut qu’avoir souffert. Dans un sens, je suis heureuse d’avoir été adoptée, je ne sais pas ce que j’aurais fait sans mes parents. Ce sont des gens bien, sur qui je peux compter.
Assise sur ma chaise, j’y repense. C’est fou. Il y a trois ans je tremblais de peur à l’idée de revoir un jour mon père, maintenant, je suis soulagée. Je n’ai plus de nouvelles de lui depuis un an et j’aime ça. C’est un vent de liberté qui souffle dans mon être, comme si je pouvais être moi sans craindre de ce qu’il adviendra. J’ai toujours eu l’impression qu’on me regardait d’un œil méfiant que je me baladais sur le chemin de traverse. Maintenant, c’est comme si on ne me voyait pas, comme on ne voit pas les quatre cinquième des personnes qui marchent à côté de nous ou que l’on frôle de peu.
Tandis que je mange un toast grillé, je sens des plumes chatouiller ma main gauche posée sur la table. C’est un hibou qui m’envoie une lettre. C’est ma mère. Elle a joint un courrier de Stanley, mon meilleur ami moldu. Le sourire aux lèvres, j’ouvre délicatement l’enveloppe de ce dernier, il y a bien deux pages de rédigées. Un peu de lecture va me faire du bien après avoir repensé à mon père. Deux paires d’yeux sont fixés sur moi. Je ne peux pas l’ouvrir ici, Stanley n’existe pas pour les sorciers, ce n’est qu’un minable moldu parmi les autres.
On se voit plus tard, je dois répondre à ma mère.
Je me lève en leur souriant et me dirige vers la sortie. Elles ne me suivront pas. Elles savent que quand j’écris à mes parents, j’aime bien être seule, quand j’écris tout court d’ailleurs. Où puis-je aller pour ne pas être dérangée. Nous sommes dimanche, nous n’avons pas cours. Même si la plupart des élèves sont dans la grande salle, je sais qu’il y en aura forcément où que j’aille. Et puis zut, la volière, je vais à la volière. Il ne fait pas beau, personne ne va venir me déranger dehors.
STANLEY LEOPOLDUS FRAID TU NE M’AS PAS FAIT CA !
MAIS IL EST FOU OU QUOI ? Il n’a rien trouvé de mieux que de sortir avec ma pire ennemie ? Les garçons sont des êtres idiots. Dans un sens, je savais que ça allait arriver. Je dois bien avouer qu’elle est belle, mais il a l’air amoureux. En fait c’est ça le pire, ce n’est même pas qu’il sorte avec elle. Comment il peut l’aimer, avec des sentiments et tout. C’est biologiquement pas possible, ni psychiquement. Stanley il est doux, il est gentil, il est simple. Elle, c’est une manipulatrice, une narcissique, une égoïste. Bon d’accord j’y vais peut-être un peu fort, mais franchement, elle n’est pas faire pour lui. J’avais pressentie qu’elle lui tournait autour depuis cet été. Il est tombé dans ses filets. J’aurais dû le mettre en garde, mais je croyais qu’il ne lui céderait pas. Quand on avait huit ans il lui avait dit qu’il ne l’aimait pas, je m’en souviens comme si c’était hier. « Lindsay, je t’aime pas, t’es trop méchante. Et en plus, tes yeux ils sont pas bleus ». Maintenant il s’en fiche pas mal de la couleur de ses yeux. Mais s’il est heureux avec elle, j’ai rien à dire, même si ça me ferait bien mal d’avoir à la remercier parce que grâce à elle il peut s’épanouir.